Avec Origami, son troisième album, Sylvain Fesson invite à une exploration musicale aussi subtile que fascinante, à mi-chemin entre la pop expérimentale et une chanson française d’avant-garde. Chaque morceau y déploie des sonorités et des émotions comme autant de figures pliées avec précision, évoquant une maîtrise artistique proche de l’art japonais éponyme.
Sylvain Fesson ne s’inscrit pas dans une quête de la révolution musicale, mais dans celle de la sincérité et de l’unicité. Avec l’aide de Vivien Pézerat à la production et aux arrangements, l’album propose neuf titres où chaque élément semble minutieusement choisi, comme si la musique elle-même se transformait en origami sonore. De la délicatesse aérienne de Caprice des Dieux à l’intensité poétique de Ciel de Shoah, l’album trace un chemin où chaque morceau a sa propre identité, tout en contribuant à une cohérence d’ensemble étonnante.
Les voix de Céline Wadier, Lila Lakehal et d’autres artistes ajoutent une dimension quasi-cinématographique à l’album. Sur Parfois, l’apport des sonorités orientales, porté par des harmonies vocales envoûtantes, ouvre une porte sur un univers d’émotions riches et contrastées. Ce titre, véritable invitation au voyage intérieur, illustre parfaitement la capacité de Fesson à conjuguer complexité musicale et accessibilité.
Les textes de Fesson, à la fois introspectifs et universels, rappellent que l’art du pliage ne repose pas uniquement sur la technique, mais sur l’intention. Sa plume évite l’excès lyrique tout en atteignant une intensité rare, comme sur L’Amour au Soleil, une ode douce et lumineuse à l’intimité partagée. Là, les mots se déposent avec la délicatesse d’un souffle, soutenus par une instrumentation minimaliste qui privilégie l’épure.
Là où Origami surprend, c’est dans sa capacité à naviguer entre différents styles sans jamais perdre son fil conducteur. Amy, par exemple, superpose une mélodie mélancolique à un sample de la voix d’Amy Winehouse, créant un mélange à la fois nostalgique et expérimental. À l’opposé, Center Parcs apporte une légèreté rythmique teintée de shoegaze, tandis que le morceau-titre, Origami, flirte avec la transe et le jazz, porté par un saxophone presque en roue libre.
À l’instar d’un pliage complexe, Origami révèle de nouvelles facettes à chaque écoute. Il s’inscrit dans une démarche artistique audacieuse, où la répétition des motifs musicaux crée une forme d’hypnose mélodique. Sylvain Fesson offre ici une musique qui prend son temps, qui caresse plutôt qu’elle ne frappe, et qui privilégie la sincérité à l’esbroufe.
Origami est une exploration des limites de la chanson pop et de ses possibilités narratives. Fesson, sans jamais chercher à imposer, propose un voyage musical d’une rare richesse. À l’heure où les productions formatées envahissent les ondes, cet album est une bouffée d’air frais, un appel à écouter, ressentir, et se laisser porter. Un conseil : laissez-vous surprendre par ce pliage musical délicat. Vous en ressortirez transformé, comme si chaque note avait contribué à créer une œuvre unique, à l’image de l’origami qui l’inspire.
Prochainement en programmation dans Solénoïde, émission des musiques imaginogènes diffusée sur 30 radios/50 antennes FM-DAB !
Sylvain Fesson, poète et explorateur sonore, conjugue mots et musique pour tracer des chemins inédits. Entre écriture incisive et collaborations audacieuses, il crée des univers singuliers, mêlant intensité cinématographique et textures musicales hybrides. Avec des projets allant du baroque à l’ambient en passant par des chansons charnelles et oniriques, il incarne une vision artistique qui défie les formats et invite à l’expérience.