GROSSO GADGETTO

I Need You

Autoproduction - août 2024

Chronique

Avec I Need You, Grosso Gadgetto nous invite à explorer un monde sonore en clair-obscur où les machines semblent s’animer d’une âme propre. Véritable odyssée musicale, cet album mêle mélodies enveloppantes et textures électroniques immersives, créant un équilibre fascinant entre l’organique et le synthétique. Paru en août 2024, ce projet se distingue par son accessibilité relative tout en conservant une profondeur introspective et une richesse sonore inépuisable.

Pochette de l'album "I Need You" de Grosso Gadgetto (Gonzalez Christian). Artwork réalisé par Sick Ced

Depuis ses débuts en 2002, Grosso Gadgetto s’impose comme une figure singulière de la scène musicale indépendante, évoluant hors des cases conventionnelles. Qu’il compose pour des films, des spectacles ou des jeux vidéo, il déploie un éventail de sonorités où se croisent hip-hop, musique industrielle, électronique expérimentale et ambiances cinématographiques. I Need You reflète cette approche éclectique : c’est un album pluriel qui parle autant à l’esprit qu’aux émotions.

L’album s’ouvre sur The Forgotten, une introduction à la fois attractive et énigmatique, où des rythmiques chaloupées côtoient des nappes atmosphériques empreintes de mystère. Chaque morceau semble raconter une histoire fragmentée, oscillant entre introspection et dystopie. Dans Like a Gondola in Venice, on se laisse porter par une mélodie fragile qui évoque une Venise futuriste engloutie par ses propres eaux.

Grosso Gadgetto qualifie I Need You comme son album le plus mélodique, et cela se ressent dans des titres tels que Remember Yesterday ou I Do Not Dream Anymore, où l’émotion transparaît à travers des harmonies délicates. Pourtant, l’artiste ne cède jamais à la facilité : chaque piste est construite avec une minutie quasi architecturale, empilant des couches sonores qui s’effacent et se superposent comme les ruines d’une métropole abandonnée. La musique de cet album est à l’image de sa pochette : une nature vibrante qui s’étend sur les vestiges d’un monde urbain en déclin.

La force de cet album réside aussi dans son homogénéité, contrebalancée par des variations subtiles d’intensité. The Little Boy’s Doll s’appuie sur des nappes synthétiques et des lignes de basse charpentées, où plane une mélancolie palpable. Le morceau éponyme, I Need You, agit comme le cœur battant de l’album, mêlant mélodiques entêtantes et rythmiques lancinantes pour un résultat immersif. Quant à After Which, Do You Run ?, il clôture l’album sur une note introspective, une montée en tension lente mais implacable qui laisse une empreinte durable.

Ce qui distingue I Need You, c’est sa capacité à désorienter tout en captant l’attention. À travers ses collaborations passées et ses projets variés, l’artiste a développé une palette sonore unique qui s’exprime ici avec une maîtrise totale. La richesse des textures et la profondeur des arrangements témoignent d’un travail minutieux, à mi-chemin entre expérimentation audacieuse et quête d’émotion brute. Les 10 titres s’enchaînent d’ailleurs comme les chapitres d’un récit palpitant, où se mêlent nostalgie et résilience. Cet album est une invitation à se perdre dans un monde sonore envoûtant et dérangeant, à explorer sans filet les méandres d’un imaginaire à la fois troublant et magnétique.

En somme, Grosso Gadgetto livre ici un opus puissant et généreux, une synthèse de son parcours qui s’impose comme un incontournable, une œuvre à part dans une discographie déjà foisonnante. Et pour ceux qui souhaitent prolonger l’expérience, rendez-vous sur sa page Bandcamp ou sur les labels qui soutiennent cet artiste rare et précieux.

En programmation dans Solénoïde – Grande Boucle 54, émission des musiques imaginogènes diffusée sur 30 radios/50 antennes FM-DAB !

A propos de GROSSO GADGETTO

Depuis plus de vingt ans, Grosso Gadgetto explore les marges sonores avec une créativité débordante et un refus assumé des conventions. À la croisée du hip-hop indépendant, des musiques électroniques et industrielles, il tisse des univers cinématographiques sombres et immersifs, où se mêlent drones hypnotiques, rythmiques percutantes et mélodies captivantes. Ses compositions, à mi-chemin entre chaos et harmonie, évoquent des bandes-son de dystopies intenses et claustrophobes. Fort d’une discographie prolifique, disponible sur Bandcamp et soutenue par des labels tels que Mahorka ou Jarring Effects, il s’impose comme un architecte sonore inclassable et fascinant.
Photo de l'artiste Grosso Gadgetto (Christian Gonzales)

Solénothèque

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