MEAJAM

Utopia

Mazeto Square - Mai 2025

Chronique

Il arrive parfois qu’un album nous attrape sans prévenir. Qu’il murmure à l’oreille des images que l’on croyait perdues : un souffle dans les feuilles, un silence qui respire, une lumière qui tremble. Avec Utopia, le quartet MEAJAM ne compose pas un disque, mais un territoire. Un lieu de résonance entre l’humain et le vivant.

Pochette de l'album "Utopia" par le groupe Meajam

Emmené par le pianiste et compositeur Xavier Faro, MEAJAM – formation fidèle depuis deux décennies – livre ici un disque-monde, nourri d’un jazz narratif et onirique, infusé de pop, de musique classique et d’images mentales. Après Dans l’herbe (2014) et L’Envol (2019), le groupe franchit un nouveau seuil. Utopia n’est pas un simple troisième opus : c’est une cartographie intérieure, un manifeste mélodique.

Neuf titres. Neuf fragments d’un parcours initiatique. D’un regard d’enfant (Petits Cowboys) à l’ultime sagesse d’un arbre géant (Le Chêne), MEAJAM déploie une suite de tableaux sensoriels, entre contemplation et urgence. Le piano, à la fois sismographe et guide discret, tisse un fil d’Ariane entre les éléments : l’eau, le vent, la lumière. Dans Château de cartes, la flûte de Ludivine Issambourg serpente entre les ruines de nos illusions. Dans Le Ruisseau et surtout Transmission, la voix de Clémence Lagier ne chante pas, elle incante. Elle évoque les voix oubliées des générations, les mémoires liquides, les récits enfouis.

Le septième titre de l’album n’est pas un morceau comme les autres. Transmission est un rite. Une lente montée. Une déchirure douce. La voix s’y mêle au souffle du saxophone, au piano comme une marche intérieure. Il ne s’agit plus de jouer, mais de faire advenir. La musique devient passage, seuil entre ce qui fut et ce qui peut advenir. La Source, huitième pièce, enchaîne sans rupture. Ici, tout devient clair. Le piano s’y déploie comme une eau lente. Le saxophone respire. La contrebasse bat doucement sous terre. Et la batterie pose des cercles dans l’espace. Cette musique ne raconte pas, elle lave. Elle dépouille. Elle redonne à l’écoute une pureté première. C’est peut-être là que réside la véritable utopie : dans cette capacité à se relier, sans mots, aux forces simples du monde.

MEAJAM ne cherche ni l’éclat ni la démonstration. Son jazz est une œuvre d’attention. Une musique qui se construit dans l’écoute partagée, le silence accordé. Chaque musicien — Alain Angeli (saxophones), Fabrice Camboulive (contrebasse), Laurent Meyer (batterie) — tisse une présence collective sans ego, au service d’un souffle commun. Avec Utopia, MEAJAM livre un album limpide et essentiel. Un disque qui fait le pari de la lenteur, de la nuance, de la beauté sans emphase. Une utopie ? Non : une nécessité. Une musique à écouter comme on se baigne dans une rivière, comme on s’assied au pied d’un arbre. Pour se souvenir que la musique peut encore nous relier au monde, et à nous-mêmes.

Prochainement en programmation dans Solénoïde, émission des musiques imaginogènes diffusée sur 30 radios/50 antennes FM-DAB !

A propos de MEAJAM

Quatre musiciens, une respiration commune

Un pied dans le jazz, une oreille sur le cœur : MEAJAM, c’est l’union organique de quatre musiciens soudés par vingt ans de complicité. Porté par les compositions sensibles du pianiste Xavier Faro, le quartet toulousain cultive un jazz poétique, libre, toujours en quête d’émotion vraie. Autour de lui, Alain Angeli (saxophones), Fabrice Camboulive (contrebasse) et Laurent Meyer (batterie) tissent un langage commun fait d’intuitions partagées, de silences habités et de paysages sonores en clair-obscur.

Depuis ses débuts en 2010 dans un studio près de Toulouse, MEAJAM cherche moins à impressionner qu’à toucher. Leur musique ne se contente pas de jouer : elle raconte, elle respire, elle relie.

Photo du groupe toulousain Meajam avec Xavier Faro (piano et compositions), Alain Angeli (saxophones ténor et soprano), Fabrice Camboulive (contrebasse) et Laurent Meyer (batterie)

Solénothèque

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