NLF3

O Days

Prohibited Records - octobre 2024

Chronique

Avec O Days, NLF3 invite à un périple sonore unique, où chaque morceau devient une escale aux contours insaisissables, tour à tour rythmé et méditatif, empli de sonorités variées et envoûtantes. À travers cet album conçu entre 2020 et 2024, le trio français redéfinit les contours de sa musique en mêlant expérimentation et liberté créative, tout en rendant hommage à l’instant présent et à une approche artistique profondément indépendante.

Pochette de l'album "O Days" par le groupe NLF3

L’aventure O Days commence en pleine période de confinement, en 2020. Séparés physiquement, les trois membres du groupe – Fabrice Laureau (basse, kalimba, synthétiseur modulaire), Nicolas Laureau (guitares, claviers, voix, percussions) et Jean-Michel Pirès (batterie) – échangent alors des fichiers et des idées musicales. Ce travail fragmenté, réalisé chacun chez soi, s’intègre finalement à la construction de l’album, où les sons de leur quotidien – bruits de fond, enregistrements spontanés – se fondent dans la matière musicale elle-même.

Chaque morceau de l’album renvoie à une étape de ces journées passées en retrait, mais aussi en exploration, de ‘Prince One à ‘Submarine‘, qui transforment en atmosphères sonores les rythmes de confinement. Le titre de l’album, O Days, évoque cette lente succession de jours passés à recréer un monde sonore en dépit de l’enfermement. À travers ce processus, NLF3 transforme la contrainte en potentiel créatif, laissant émerger une musique emplie de nuances, de sons bruts et d’émotions subtiles.

Avec cet album, NLF3 atteint un équilibre rare entre l’expérimental et l’organique. Le groupe, né après la dissolution de Prohibition en 1999, s’est réinventé dans une approche de la musique libre de toute structure rigide, où le rock sert de point de départ sans en limiter les possibilités. Dans O Days, cette ouverture se manifeste par des rythmes qui oscillent entre la fluidité et la pulsation insistante, rappelant le krautrock de Can ou le psychédélisme d’Os Mutantes, tout en s’enracinant dans une recherche sonore proprement contemporaine.

Chaque piste est construite comme une sorte de vortex auditif où les rythmes et les résonances s’entremêlent pour créer une dynamique immersive. Cette musique invite à l’introspection tout en restant profondément connectée au réel, offrant des mélodies légères mais insidieuses, qui restent en mémoire comme des souvenirs diffus. Dans des morceaux comme ‘We Went To Nagoya et ‘Spring Tun , le groupe mêle des sons et des styles venus d’horizons multiples, créant une sorte de cartographie musicale où chaque piste reflète une escale, une culture, un fragment d’ailleurs.

La création de O Days marque un tournant pour NLF3, qui célèbre, par ailleurs, ses deux décennies d’existence. Depuis leur premier album en 2000, le trio s’est affirmé comme une entité musicale unique, tissant une trame sonore qui résiste aux tendances pour privilégier l’intégrité artistique et la diversité d’influences. Ce parcours s’accompagne de la liberté que leur confère leur label indépendant, Prohibited Records, fondé en 1995, qui leur permet de préserver une autonomie essentielle.

Fabrice Laureau décrit NLF3 comme un terrain d’expérimentation collective, où la spontanéité est au cœur du processus. La force du groupe repose sur une alchimie entre leurs sensibilités individuelles, enrichies par leurs projets personnels, et leur dynamique créative collective. Cet équilibre leur a permis de créer une musique qui traverse le temps et les modes, portée par une énergie toujours renouvelée et une volonté de réinvention constante.

Avec sa construction quasi hypnotique et ses motifs récurrents, O Days agit comme un espace de méditation sonore où la répétition devient un mantra, une invitation à se perdre pour mieux se retrouver. L’album porte en lui la densité et la légèreté d’un univers parallèle, un monde où chaque son est un chemin et chaque rythme une porte ouverte sur un ailleurs. Cette immersion progressive, qui se déploie de morceau en morceau, confère à l’album un effet de transe qui parle aussi bien à l’esprit qu’au corps.

L’auditeur est transporté dans une suite de paysages sonores qui prennent vie dans un va-et-vient entre intensité et suspension, comme si NLF3 avait capturé l’essence même du moment, dans ce qu’il a de fugace et de puissant. Loin de toute nostalgie, le trio crée une musique ancrée dans le présent, où l’instant devient matière première et où chaque son, même le plus infime, participe à construire un monde complet et singulier.

Quelles directions s’ouvrent pour NLF3 après O Days ? Le groupe reste fidèle à son approche spontanée et imprévisible, où chaque projet est une occasion de découvrir des facettes insoupçonnées de leur créativité. Pour eux, la musique instrumentale est un terrain de jeu infini qui permet de multiplier les expérimentations, d’enrichir ou de dépouiller les compositions selon l’énergie du moment.

L’avenir, comme le souligne Nicolas Laureau, est une page encore blanche, mais NLF3 se sait capable de renaître à chaque période, tel un phénix musical. Dans les années à venir, le groupe envisage de revisiter certains de ses classiques, comme Que Viva Mexico!, ou encore de célébrer les 30 ans de Prohibited Records. Cependant, leur indépendance et leur liberté créative resteront toujours au centre de leur démarche, assurant à NLF3 une place unique dans le paysage musical.

En définitive, O Days est une œuvre rare et immersive, où l’expérimentation se marie à l’instinct pour livrer un album qui captive, hypnotise, et transporte. NLF3 poursuit son voyage musical sans se laisser enfermer, fidèle à une vision qui allie diversité, authenticité et liberté totale.

En programmation dans Solénoïde – Grande Boucle 54, émission des musiques imaginogènes diffusée sur 30 radios/50 antennes FM-DAB !

A propos de NLF3

NLF3, trio instrumental fondé en 2000 à Paris par les frères Nicolas et Fabrice Laureau, rejoints en 2006 par le batteur Jean-Michel Pirès, est un groupe qui brise les frontières musicales. Leur musique, riche en boucles hypnotiques et en textures subtiles, marie les paysages sonores d’une bande originale avec l’énergie brute du rock psychédélique et l’audace de l’électronique. Après deux premiers albums remarqués, leur bande originale pour Que viva Mexico! de Sergei Eisenstein, interprétée en live, les propulse sur la scène internationale. Explorateurs sonores infatigables, NLF3 se réinvente à chaque projet, créant une musique envoûtante, vibrante de liberté.

Photo du groupe NLF3 avec Fabrice Laureau, Nicolas Laureau et Jean-Michel Pirès.

Solénothèque

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